14/02/2008

20.04.07. DES FEMMES BASQUES EN PRISON… / LA DYNAMIQUE DES TÉMOIGNAGES


INTRODUCTION. "Pour la diffusion publique de ces témoignages, le choix de la "Rédaction Iraultzako bidea" est de ne pas mentionner les noms des intervenantes pour refuser tout ‘personnalisme’ des violences imposées par les États français et espagnol vécues, à un niveau collectif, par le peuple basque(1) …
Cela n’enlève rien de la force de chacun des témoignages, de la réalité de ceux-ci et de leur portée. Au contraire, cela traduit la constante pratique collective de ces femmes q
ui luttent pour la liberté de leur peuple et de leur pays : Euskal Herria.
La dynamique des prisonnières politiques basques.
Les paroles de ces femmes qui vivent en Zuberoa, Lapurdi, Baixa Nafarroa donnent des reflets exacts et lumineux de ce qu’est la Gauche Indépendantiste basque, aujourd’hui, au quotidien, jusque dans les sombres prisons des États : une mise en œuvre sociale vitale, profonde et solidaire, une dynamique qui refuse l’Injustice du capital et de son système colonial, une volonté commune qui reconstruit d’autres outils pour l’avenir d’un peuple Libre et Digne, sur ses terres. Une terre ouverte aux autres, s
olidaire des autres peuples construisant un socialisme, dans le respect du Droit à l’autodétermination."
(1) Seuls ont été conservés les noms de deux couples p
risonnier-e-s politiques basques cités dans les témoignages, des cas de parents dont le Droit de visite avec leur enfant a été bafoué.

Prise de notes (en français et catalan) écrites, photographies, mise en forme et publication par la ‘Rédaction Iraultzako bidea’. Photo1,2,3,4,5. ‘Manifestation de soutien aux prisonnières politiques basques’ Avril 07. Place des cinq cantons. Baiona, EUSKAL HERRIA.
Les parties en’ italique gras’ et les renvois* sont d
es ajouts de la ‘Rédaction Iraultzako bidea’.


20.04.07 Centre Elgar d’Hazparne (Lapurdi, EUSKAL HERRIA)
Réunion publique et débat organisé par Emazte Diote* (*Association de femmes).
"EMAZTE PRESOEN EGOERA. Afektibitatea, amatasuna, amatasun-eza, etab / FEMMES EN PRISON. Que deviennent : l’affectivité, la mater
nité ou l’impossibilité d’être mère, la relation avec leur compagnon, etc ?"
Esaleak / Les intervenantes.
ETXERAT elkartik presoatik familiak eta Preso ohiak. ETXERAT, association de familles de prisonnier-e-s et des anciens-ne-s prisonnier-e-s politi
ques.

EMAZTEEK DIOTE :
Il est important de mettre en avant les problèmes quotidiens des détenues avec la question d
e leurs Droits bafoués :
- le Droit ou le déni d’être mère,
- l’affectivité,
- les relations avec les familles,
- la sexualité....
→ Dans le contexte de sa participation au FORO IBAETA, comme l’ensemble des signataires, ETXERAT s’est engagé à réaliser chaque mois un appel spécial au rassemblement pour les Droits des prisonnier-e-s politiques Basques.
→ A l’intérieur, depuis leurs cellules, les prisonniers politiques basques poursuivent la lutte au travers d’un Collectif (2) qu’ils ont constitué. Des représentants sont élus au sein des prisons de l’État français et espagnol. Ce Collectif est l’un des acteurs de la société basque et il fait partie intégrante du processus de négociation en cours. Le col
lectif a exprimé son souhait de faire partie d’une des deux tables de négociation en cours : une discussion s’est engagée en interne. Elle n’est pas encore achevée et close... Elles aussi, les familles des ‘presos’ sont des agents actifs dans l’action menée par le Collectif des prisonniers politiques Basques.
(2) EPPK : EUSKAL PRESO POLITIKOEN KOLEKTIBOAK.

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.

Je suis la mère d’une prisonnière politique ba
sque. Ma fille a eu la condamnation de 12 années de prison. En détention, l’infantilisation des personnes est permanente : toute initiative est prohibée et aussitôt réprimée. L’espace privé n’existe plus : c’est la négation totale de la personne avec la privation de réelles relations familiales et de l’amour. Le ou la juge décide de tout : il est la tête de l’administration, il a un impact immédiat sur nos conditions de vies.
J’ai vécu moi-même la détention. J’ai été arrêtée, il y a 13 ans, avec mon époux. Cela s’est passé chez moi, en présence de mes 4 enfants dont deux adolescents, un enfant de 3 ans et un nouveau-né de 2 mois...

Le plus dur, c’est la procédure de la garde-à-vue (3). Elle a duré 4 jours. Ils ont fait pression sur moi, en utilisant les enfants. Même si on sait que ce n’est pas vrai, qu’ils ne peuvent pas le faire, on croit les policiers quand ils menacent de nous retirer les enfants, de les placer en foyer d’accueil et de les emmener dans les services sociaux.
Finalement, mes parents ont eu la garde de nos enfants. Proches de la soixantaine, ils étaient déjà âgés pour avoir la charge de 4 enfants dont un bébé de 2 mois ! Mon avocate m’a alors signalé la possibilité de rester avec mon fil
s âgé de 2 mois en allant à la prison de Fleury, à Paris. Je suis donc allée à Fleury. J’ai eu la chance de rester seulement 9 mois en détention…
C’est à la mère de remonter le moral des enfants et pas l’inverse ! Dès que les enfants sentent que le moral est bas : ils réagissent tout de suite. Notre relation est aussitôt atteinte. Il faut être forte, c’est une obligation.
Pour moi, le vrai choc a été la découverte de la misère des femmes incarcérées. On était pourtant privilégiées. Et en pris
on, sans argent, c’est encore plus difficile que dehors, c’est impossible de vivre dignement !
En tant que femme basque : dès que l’on arrive, on est prise en charge par les autres prisonnières politiques basques. La solidarité est très grande. Je ne suis restée que 9 mois, cela a été une forte expérience : c’est sûr que l’on voit la vie différemment quand on est allé en prison. Mais j’ai essayé de tirer les bénéfices de cette expérience.
Mon époux avait un restaurant, à l’extérieur aussi la solidarité s’est immédiatement mise en place. Grâce au soutien et au relais de personnes bén
évoles qui se sont spontanément organisées entre elles : le restaurant a poursuivi ses activités, sans devoir fermer un seul jour.
(3) Dans l’Etat français, la garde à
vue ne dépasse pas 48 heures, mais les Loi anti-terroristes des Etats autorisent toutes les pratiques, sans aucune limitation.

Témoignage de la Femme B : ancienne prisonnière politique basque et mère d’un jeune prisonnier politique basque détenu à Puerto Santa Maria à Cadiz, dans l’État espagnol.
Un éloignement volontaire. Les trajets : un danger mortel.
Mon fils a été condamné à 8 ans de
détention Il est incarcéré dans la prison de Puerto Santa Maria à Cadiz. Le trajet fait 1500 km ! Nous mettons, mon époux et moi, 3 jours pour aller et revenir. La visite familiale, c’est de 2h30 une fois par mois. Cela veut dire 40 minutes derrière une vitre, le week-end. Nous partons le vendredi après-midi pour revenir le dimanche après-midi. Maintenant la situation a changée sans que l’on sache pourquoi : mon fils n’a plus droit qu’à 10 visites pour 3 mois…
Heureusement pour moi, d’autres personnes vont le voir : des amis à lui. Quand je ne peux pas y aller, cela me rassure de savoir que d’autres von
t le voir... Mon fils m’a interdit de venir si souvent. Il a peur de la route, à cause du danger qu’elle représente, chaque fois, lors de chaque visite, pour nous. D’ailleurs, je crois que cet éloignement est fait pour ça, pour atteindre les familles, les proches et les mettre en danger. Chaque année, parmi les innombrables familles des prisonnier-e-s politiques basques qui viennent voir un de leur membre incarcéré la plupart sont victimes d’accidents dont la plupart sont mortels... Le trajet de Madrid à Donostia est particulièrement dangereux.
... Discussion en euskara sur le temps en prison :
- le temps limité des échanges avec les prisonniers, par téléphone et lors des visites,
- le temps et l'espace contrôlés à chaque seconde par le milieu carcéral,

- le temps pour obtenir des informations et consignes fiables,
- le temps du contrôle, de la rétention puis de l’arrivée du courrier au détenu et inversement,
- le temps infiniment long pour réaliser chaq
ue chose en prison,
- le temps des actes administratifs : le temps de la prise en compte de chaque demande isolément, le temps de la décision rendue, le temps de la transmission de la décision rendue, le temps de la mise en application de celle-c
i,
- le temps des mesures d’exception qui suspendent pour un temps indéfini les décisions rendues...
- le temps de l’attente,
- le temps des retrouvailles avec la famille et les amis,

- le temps de la séparation,
- le temps de la condamnation,
- le temps de la prolongation arbitraire de pei
nes achevées,
- le temps de la garde a vue,
- le temps de la mise au secret et de la torture,
- le temps de l’attente pour les soins, le temps de souffrir des 'soins' inadaptés à la douleur,
- la dépossession permanente de son propre temps y compris celui de son temps intérieur avec la torture psychologique.
Échanges entre les femmes sur les différences de conditions et de règlements intérieurs entre les États français et espagnol, puis d’une prison à l’autre...

Témoignage de la Femme C : épouse d’un prisonnier politique basque. En liberté provisoire, auparavant détenue sur Paris, dans l’État français.
Trois ans ont passé depuis que des personnes toutes
en noir et cagoulées ont fait intrusion dans notre maison, très tôt le matin. J’étais avec mon mari et mes trois enfants. Ils nous ont arrêtés et nous avons été isolés, durant tout un mois en prison, avec l’interdiction absolue de voir nos enfants...
Les visites : les enfants

Après cette période d’isolement, nos enfants ont eu le droit de nous rencontrer. Les visites ont dû se faire de façon séparée : d’abord leur père, puis moi. Les juges ont maintenu l’éloignement et la séparation des visites, au lieu de les regrouper dans un même lieu géographique.
Durant trois ans, mes enfants ont été obligés de prendre le train pour d’abord aller voir leur père, puis attendre la nuit dans la station ferroviaire, tout seuls dans des conditions déplorables. A leur âge, ils ont vus des choses dures dans les gares comme plusieurs suicides de personnes. Ils ont côtoyé de très près la misère humaine et sociale d’une foule d’exclus…
Depuis un an, je suis en liberté provisoire. Je n’ai pas vu mon mari depuis 4 ans ! Je suis restée 16 mois en détention. Durant tout ce temps, j’ai vu mes enfants dans un petit box fermé et vitré. Les gardiennes s’immisçaient jusque da
ns nos conversations entre mes enfants et moi ! Elles disaient des choses directement à mes enfants, sans mon accord et en ma présence. Elles leur ont dit que j’allais entamer une grève de la faim et bien - entendu, je ne voulais absolument pas que mes enfants le sachent ! Ils ont été très inquiets…
Lors des visites, je ne pouvais pas embrasser mes enfants, ni les toucher ni les prendre dans mes bras car je risquais à tout moment de craquer et de mettre à pleurer, devant eux : et ça, ce n’était pas envisageable pour moi ! Je ne voulais pas qu’ils voient ma souffrance ! Par la suite, mes enfants me l’ont reproché : ils avaient besoin de cette proximité physique et de me sentir, même triste…
La condition humaine, la condition de la femme détenue.
La perte de l’amour : le compagnon ou la compagne, les enfants, la famille et les amis.
La perte du travail et des relations sociales.
La perte de la santé.
La perte de la sexualité.
La perte de l’intimité.

La perte de la liberté de mouvement et d’expression.
La perte de la dignité humaine.
La perte d’identité…
En prison, j’ai rencontré des femmes qui ont TOUT perdu, en peu de temps. On absorbe les souffrances des autres. Il y a des cas vraiment extrêmes, des choses que nous ne pouvons pas imaginer avant d’être détenue…
Les fouilles
On est tout le temps obligées de se déshabiller et de se rhabiller. Cela peut même aller très loin avec certaines gardiennes qui sont perverses. C’est dur.
Gérer sa souffrance et celle des autres détenues
Dans sa cellule, on se retrouve à gérer la souffrance des autres. N’importe qui se retrouve en prison ! On voit beaucoup de cas psychiatriques, autrement dit des personnes qui n’ont rien à faire en prison… Dans ma cellule, j’étais moi-même avec une femme âgée de 40 ans, mais qui avait mentalement 3 ans ! Elle était devenue l’objet de tous les abus de la part des gardiennes. Grâce à notre solidarité entre détenues, nous l’avons protégée de cette situation.
La sortie. Après la prison, la prison continue…
En prison, on pense tout le temps à la sortie : c’est une obsession ! Et puis, quand on sort, on découvre que ce n’est pas si évident que ça ! On n’a pas
la sensation d’être vraiment sortie de prison ; ça continue dehors… différemment, sous d’autres formes. Une fois sortie, on découvre d’autres choses, d’autres souffrance qui découlent directement de la détention. Mon époux est toujours en prison et je n’ai toujours pas le Droit de le voir.

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
La maternité, l’accouchement / La rupture des liens familiaux
Avec mon fils, à peine âgé de deux mois, j’ai été détenue à l’hôpital de la prison de Fresnes à Paris. J’ai découvert comment fonctionnait le service pour les femmes enceintes détenues, les conditions et les répercussions de l’accouchement en milieu carcéral… Le service dispose d’un pédiatre pour 14 femmes. Elles sont de toutes les nationalités : marocaines, kurdes, roumaines, yougoslaves, rwandaises, congolaises, boliviennes, françaises et de toutes les cultures : africaines, d’amérique latine, des pays de l’Est, occidentale, méditerranéenne, orientale etc… Pour la confession religieuse : on est classées soit ‘pratiquante’, soit ‘
rouge’ !
La plupart de ces femmes vivent un stress important parce qu’elles vont mettre au monde leur enfant en prison. En plus, Fresnes est une très vieille prison et ce contexte d’un vieux bâtiment gris, sombre et vétuste est encore
plus lourd pour le moral... Après l’accouchement, en général, c’est une période de blues, mais c’est encore pire en détention ! Beaucoup de femmes vivent un vrai état de choc et elles délaissent leur enfant. Mais de toute façon, le plus triste, c’est qu’elles n’ont plus aucune visite d’un homme qu’il soit leur compagnon, le père ou le géniteur de l’enfant. En tant qu’étrangères, elles sont loin de leur pays et de leurs familles et peu de liens sont conservés... Je suis vraiment heureuse d’avoir accouché ici, chez moi, en Euskal Herria et pas en prison. La 1ère semaine d’accouchement, les femmes n’ont le droit à aucune visite…
La rupture des liens culturels
Les moments de la maternité et de l’accouchement sont évidemment très forts : ils font émerger avec force et ils mettent en jeu l’identité, l’histoire et la culture de chaque personne. La prison impose aux femmes une seule langue : le français que très peu comprennent bien et une seule culture. Leur manière de faire, leurs gestes q
uotidiens et la façon d’éduquer leurs enfants sont contrôlés et niés par l’institution pénitentiaire qui applique le modèle de la République française avec une seule langue et une seule culture qualifiée de ‘française’.
Le collectif des prisonnières politiques basques. La solidarité avec les détenues étrangères et de Droit Commun.

Nous, les femmes basques, on a décidé d’organiser une solidarité avec les autres détenues en majorité étrangères et en grande difficulté quotidienne. En tant que prisonnière politique basque du collectif, je me sentais vraiment privilégiée parce que j’avais forcément un statut particulier.
Par exemple, je recevais chaque jour des courriers de soutien et de mes proches ! Alors, je faisais la lecture aux autres femmes d’une partie des lett
res qui m’étaient destinées. Cela atténuait un peu la différence entre nous, on partageait ensemble des choses venues de l’extérieur : c’est ça qui est important... Pour celles qui recevaient parfois du courrier, le fait que la lettre arrive d’autres continents éloignés comme l’Amérique latine ou l’Afrique ne facilitait pas les choses.
Grâce au soutien de l’association : ‘relais enfant - par
ent’, mes enfants ont aussi pu visiter leur père, lui aussi détenu. Je vivais la différence de statut sur les moindres détails du quotidien. Et bien sûr si nous, les détenues basques, n’avions pas été solidaires avec ces femmes étrangères, l’institution ne faisait rien pour elle et au contraire elle abusait de leur Droit les plus élémentaires comme celui de pouvoir aller à la bibliothèque. Je m’étais rendu compte en allant emprunter des livres que ces femmes n’étaient pas même pas informées de leurs Droits ! La responsable de la bibliothèque m’a fait remarquer que j’étais une des rares détenues à venir et elle avait la liste de toutes les autres femmes dont le nom était inscrit mais personne ne venait. En fait, aucune des toutes ces détenues étrangères ne savait qu’il y avait une bibliothèque et qu’elles avaient le droit d’y accéder… Une liste avait été établie par l’administration pénitentiaire en utilisant leur nom, sans informer les femmes !
De nombreuses injustices et abus : un système discriminatoire
En 1994, tandis que j’étais incarcérée à Fresnes, je me souviens du cas d’une femme algérienne enceinte de 7 mois qui était là, incarcérée, en même temps que moi. Son ancien compagnon était soupçonné d’appartenir au F.I.S (Front Islamique de Salut). Ils avaient eu plusieurs enfants ensemble, mais elle avait divorcé. C’était l’époque des rafles contre les musulmans à Paris, suite aux attentats de la station Saint - Michel dans le métro parisien, revendiqués par le Front Islamique de Salut.
Cette femme algérienne était totalement innocente. Elle est restée 4 mois en prison, pour rien ! Ils n’avaient aucune charge contre elle. En plus de cette situation injuste, particulièrement dure dans son état, elle a eu ‘droit’ à un traitement très spécial, vexatoire et discriminatoire. Elle a été isolée de nous toutes. Je me souviens très bien d’elle : en 2 semaines, elle a perdu 10 kg... On était en plein de coeur de l’hiver. Alors que les détenues pouvaient rester dans une salle commune, au chaud, pour les promenades, elle devait marcher toute seule dehors dans une cour fermée, en plein froid. Elle n’avait pas le droit ni d’êt
re avec nous ni de venir à l’intérieur, au chaud, même isolée. J’allais la rejoindre et marcher avec elle dans la cour pour qu’elle ne soit plus toute seule et faire passer le temps, plus vite, en parlant avec elle. Cette femme algérienne a été relâchée après son accouchement. Elle a vécu tout ça, uniquement parce qu’elle était algérienne et musulmane : c’étaient des représailles indirectes contre le peuple algérien et les musulmans en général, suite aux actions menées par le F.I.S sur le territoire de l'Etat français.
La sexualité

Le système carcéral français n’a rien prévu pas rapport à la question des relations sexuelles : elle nie leur existence et la possibilité qu’elles aient lieu lors des parloirs. Sur une simple décision du juge, je suis restée 21 mois sans voir mon époux...

Témoignage de la Femme D : membre de Etxerat
L’omnipotence des pouvoirs judiciaires / La lutte pour les Droits
Le juge a tous les pouvoirs, sans jamais avoir aucune obligation de justifier ses décisions : ce qui les motive, leur nature et leur portée ! Par exemple, dans le cas du couple des prisonniers politiques basques : Mikel Albisu Iriarte et Marixol Iparraguirre Genechea, ils ont réussi à obtenir la visite de leur enfant au Centre de Détention à Perpignan... juste avant leur récent transfert à la prison de Fresnes, à Paris ! Donc, toute
s les démarches sont à recommencer, de nouveau dans une autre prison. Ils ont passé de longs mois totalement privés de la visite de leur enfant … Cette visite est un Droit ! Il faut savoir que pour chacun de nos Droits, il nous faut lutter pour l’obtenir réellement. Par exemple, à Paris, les parents Laurenxa Beyrie et son compagnon ont enfin obtenu le Droit de visite de leur enfant. Eux aussi ont vécu des mois d’attente, incarcérés… sans voir leur enfant.

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
L’humiliation permanente
Les parloirs doubles* (4) (*la ‘Rédaction Iraultzako Bidea’ n’a pas pris de notes à ce moment-là et elle n’a pas pu retrouver, de mémoire, le contenu de cette intervention…)
(4) « (...) En ce qui concerne nos revendications propres – le regroupement des Basques de Fleury dans deux divisions de l’établissement et l’obtention d’un nombre conséquent de parloirs doubles pour les membres des familles se déplaçant depuis le pays Basque et effectuant plusieurs centaines de kilomètres (aller-retour presque 2 000 km)... (...) Jotake, irabazi arte ! » Les prisonniers politiques basques du D 5 de Fleury-Mérogis Pepu, Sua et txapote.


Témoignage de la Femme B : ancienne prisonnière politique basque et mère d’un jeune prisonnier politique basque détenu à Puerto Santa Maria à Cadiz, dans l’État espagnol.
Un contrôle quotidien : aucune intimité possible / Un régime militaire
Dans l’État espagnol, nous devons mener une véritable bataille, pour toutes les choses du quotidien. La liste des problèmes est trop longue ! Par exemple, parlons du Droit élémentaire de se vêtir proprement et dignement. Nous, les détenues n’avions droit qu’à deux culottes, deux pantalons, deux tee-shirts, etc... Le nombre de douches est limité et le temps aussi. Chaque fois, les gardiennes s’adressaient à moi d’un ton menaçant, en me disant : « tu as fini ? » juste quelques secondes après avoir commencé à me laver.
Il n’y a jamais aucune intimité en prison (5), le contrôle se fait jusque sur nos corps et l’intrusion est permanente. Tout est imposé de façon militaire, dans le moindre détail... Nous sommes forcées de le vivre, nous ne pouvons pas y échapper.
Atteindre l’intégrité physique des personnes : la nég
ation du Droit à la santé
En prison, on n’a pas le Droit d’être malade : comme toutes les démarches administratives, elles sont très longues et systématiquement contrôlées. La bataille est rude pour que le Droit d’être soigné devienne réellement effectif ! On a le temps de souffrir et les soins sont extrêmement mal réalisés. C’est volontaire, même de la part de certains médecins ! Il faut tout justifier à chaque fois. Avant de pouvoir enfin être soignée, il faut tout re-expliquer devant une longue série de différents membres de l’administration pénitentiaire… Il faut en référer systématiquement au directeur de la prison. Pour nous, les prisonnier-e-s politiques basques, l’accès au soin, c’est encore tout un dispositif spécial renforcé qui se met en place. Durant l’auscultation, le corps entier est immobilisé et sous la surveillance de gardes en mitraillettes, même pour soigner une dent… C’est démesuré ! On dirait un film américain tellement la situation est dans une exagération totalement disproportionnée, sans limites , irrationnelle… C’est très violent, il s’agit de l’application d’un programme de contrôle, complètement fou ! On se croirait dans un mauvais film : les gardes sont surarmés, ils appliquent des dispositifs d’exception parce que, pour eux, nous représentons toujours un danger permanent !
(5) Sauf peut-être dans les pensées des détenu-e-s, l
eurs rêves et cauchemars quand ils dorment...

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
Soins gynécologiques avec mitraillettes
Dans l’État français, c’est exactement la même chose. Des équipes spéciales équipées de mitraillettes sont mobilisées pour chaque soin des prisonnières politiques basques. Elles restent durant la séance de soins y compris ceux qui sont gynécologiques…

Témoignage de la Femme B : ancienne prisonière politique basque et mère d’un jeune prisonnier politique basque détenu à Puerto Santa Maria à Cadiz, dans l’Etat espagnol.
Un système volontaire de pénurie permanente
En Prison, on manque de tout. Que ce soit de chaussures, de vêtements, savon, papier WC, papier pour écrire et même de crayon : on n’a jamais rien ! A travers toutes ces atteintes qui affectent nos vies quotidiennes, c’est une atteinte directe contre nous.

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière
politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
Le système carcéral fait non seulement l’impasse sur nos Droits les plus élémentaires et vitaux, mais en plus il fait de la rétention volontaire d’information, il pratique la torture, de multiples moyens de pression et la violence psychologique sur les personnes. Le taux de suicide dans les prisons françaises est le plus important d’Europe !

Témoignage de la Femme C : épouse d’un prisonnier politique basque. En liberté provisoire, auparavant détenue sur Paris, dans l’État français.
Garder sa dignité
Pour nous défendre contre tout ça, c’est une résistance de chaque jour qu’on met en place. Se laisser abattre, c’est admettre la défaite. Alors, on lutte pour garder notre dignité. On lutte pour éviter de montrer à ceux de l’extérieur ce que l’on subi dedans. Avant les visites au parloir, c’est tout un rituel pour s’arranger : on se maquille, on se regarde dans la glace, on essaye de se faire belle, on se prépare...

Témoignage de la Femme B : mère d’un jeune prisonnier politique basque détenu à Puerto Santa Maria à Cadiz, dans l’État espagnol.
Les trajets pour les visites
Je me souviens très bien des premiers mois de vis
ite pour aller voir mon fils en prison, tout au Sud de l’actuel État espagnol, en Andalousie. Pour les moyens de transport, on n’avait pas trop le choix. Le moins cher et le plus sûr, c’était encore l’autobus. Au début, j’allais tout le temps voir mon fils, à toutes les visites auxquelles il avait droit ! Évidemment, j’étais très tendue et fatiguée par tous ces trajets. Je me souviens surtout d’une fois où le voyage avait été vraiment horrible. Physiquement et mentalement, j’étais dans un piteux état, mais j’étais tellement préoccupée par la situation de mon fils que je négligeais totalement ma propre fatigue...
Tandis que j’essayais de faire bonne figure, comme d’habitude, mon fils m’a dit « Tu viens trop ! » et je lui ai dit « Moi ? Pourquoi ? Tu sais, cela me plaît ces voyages en autobus : c’est très agréable ! Qu’est-ce que tu crois ? » Et mon fils continuait à me dire de ralentir le rythme de mes visites... Alors je lui ai dit : « Mais, pourquoi tu insistes comme ça ? » Alors il me répond : « Mais maman, parce que tu as une mine désastreuse ! ». Soudain, j’ai réalisé le véritable état dans lequel j’étais et que je pensais pouvoir cacher à mon fils : ce fut un choc. Ce jour-là, j’ai enfin pris conscience de la nécessité de venir moins souvent et d’une façon plus reposée.
Depuis quelques mois, ils ont mis en place un avion d
irect de Bilbo pour Jerez de la Frontera. Bien sûr, cet avion a été mis en place pour les touristes, pas pour nous les familles des prisonniers et prisonnières politiques basques ! Au lieu de trois jours de voyage, on met 1h15 ! Hors - saison, en hiver, le coût du billet est de 85 euros : c’est moins cher que l’autocar, nous avons réservé le billet 3 mois à l’avance. Par contre, en été les prix flambent pour les touristes qui arrivent en masse : le prix du même billet d’avion passe de 500 à 600 euros !
Nous, les familles des prisonniers et prisonnières politiques, on est toujours très éprouvés, très tendus. A chaque fois, c’est sur le fil. On se dit qu’on va y arriver mais tout reste incertain jusqu’au bout... Quand on prend la voiture, on ne sait pas si on va arriver. Quand il y a une panne, un problème, on prend des risques... beaucoup... on doit arriver à l’heure. Nous sommes tellement de familles à voyager !
Ce dernier week-end, là, mon beau-frère a découvert que dans son entreprise trois familles allaient rendre visite à des détenus : deux dans l’État Espagnol et une dans l’État Français... Des milliers de familles basques sont touchées par ces détentions politiques. Maintenant, quasiment plus aucune famille basque n’est épargnée, d’une façon ou d’une autre…

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
Un régime d’exception en Catalogne Nord : l’interdiction du basque au C.D de Perpignan.
Ma fille a été récemment transférée au Centre de Détention de Perpignan. Pour la première fois, elle s’est vue interdire l’usage de la langue basque au téléphone et dans ses lettres ! Mon époux était incarcéré au Centre de Détention de Châteauroux et il pouvait téléphoner et écrire en langue basque. L’ensemble des prisons de l’État français tolère l’usage des langues dites ‘minoritaires’ par téléphone et dans les courriers.
Apparemment, en Catalogne Nord, le Centre de Détention de Perpignan fait exception... Le fait d’interdire à une personne l’usage de sa langue maternelle est une violence psychologique énorme ! Chez nous, dans la famille et à la maison, on a toujours parlé le basque. On utilise le français uniquement à l’extérieur et cette langue ne nous
est pas familière et spontanée comme la langue basque. Moi et ma fille, nous n’avons jamais parlé ensemble en français mais toujours en basque ! C’est une injustice violente mais ma fille ne cède pas au chantage. Plutôt que de renoncer à la langue basque, elle a pris la décision de ne plus téléphoner ni écrire...
Des vies menacées. Des cellules surchargées.
On doit aussi parler d’un autre aspect méconnu : il n’existe pas de prison pour les jeunes femmes mineures. Je me souviens d’avoir vu des gamines âgées de 14 ans en cellule et il faut voir avec ‘quoi’... Beaucoup de détenues ont des passés extrêmement lourds. Grâce à notre solidarité commune : celle des détenues politiques avec les autres de Droit Commun, heureusement pour ces mineures, nous arrivons à faire pression pour les séparer de femmes violentes, malades psychologiquement et souvent dépendantes des drogues.
A Angoulême, ma fille a été mise avec ‘la folle’ dont personne ne veut. Il y avait 15 femmes pour 5 cellules dont une cellule en isolement, à côté. Les cellules, ce sont trois personnes pour 9m2 comme le disait la ‘Femme C’ : c’est une table, une chaise et un lit... La nuit, il n’y a absolument personne : pas de gardien. S’il se passe quelque chose de grave, voire de très grave, il faut appuyer sur un bouton qui déclenchera peut-être la venue des gardiens du Centre de Détention d’à côté. Quand ils viennent, ce qui est exceptionnel, ils mettent de 30 minutes à 1 heure !
Un soir, ma fille a eu extrêmement peur. La femme ‘
folle’ l’a menacée, durant toute la nuit. Sa vie s’est jouée à très peu de chose. Elle a pourtant appuyé sur le bouton, mais aucun gardien n’est venu. Il faut savoir qu’en prison, les détenus : hommes, femmes et enfants sont tous considérés uniquement comme des numéros. On n’appelle jamais quelqu’un par son nom mais par son numéro d’écrou...

Témoignage de la Femme C : épouse d’un prisonnier politique basque. En liberté provisoire, auparavant détenue sur Paris, dans l’État français.
Une dépersonnalisation violente des détenu-e-s
C’est vrai, je me souviens très bien de quelque chose qui m’a beaucoup choqué. Durant tout le temps de ma détention, on ne m’a jamais serré la main. Pour moi, comme pour les autres, c’est quelque chose de violent et une atteinte à notre dignité humaine. J’ai mis des mois à m’habituer. On avait une salle d’activités. Beaucoup de gens de l’extérieur, des intervenants venaient pour animer ces activités. Il y avait des écrivains, des artistes, des musiciens : c’était très rare que l’un d’entre eux nous serre la main.

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnièr
e politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
Un système d’exclusions
Les États français et espagnols parlent beaucoup de réinsertion grâce au système pénitentiaire. Dans la réalité, c’est complètement l’inverse. La prison ne réinsère personne, elle renforce les exclusions. Dedans, c’est le même système que Dehors mais pire encore… Tout le système d’exploitation humain est amplifié, sa puissance et son impact sont démultipliés. En plus, chaque prison a son propre système interne et ses propres règles différentes des autres.
La non-maîtrise du temps
En prison, le temps est très long : c’est quelque chose d’incroyable. Tout prend du temps. Pour faire des études, il faut vraiment le vouloir. Pour recevoir les cours par correspondance, il faut toujours attendre : le délai est très long.

Témoignage de la Femme B : ancienne prisonnière politique basque et mère d’un jeune prisonnier politique basque détenu à Puerto Santa Maria à Cadiz, dans l’État espagnol.
La discrimination face aux études.
Madrid a décidé de supprimer les études pour les prisonnier-e-s politiques basques et les autres car soi-disant l’université basque faisait ‘cadeau’ du diplôme ! Maintenant, mon fils a commencé à étudier à l’université de Madrid. Il est inscrit depuis le début de l’année. Il a passé des examens au mois de janvier et à ce jour, il n’a encore reçu aucun résultat : c’est catastrophique !

Témoignage de la Femme C : épouse d’un prisonnier politique basque. En liberté provisoire, auparavant détenue sur Paris, dans l’Etat français.
Une survie permanente.
Tout est contrôlé et rationné. La moindre chose élémentaire est détournée avec perversité par le système pénitentiaire : l’hygiène, les soins, les liens familiaux, les études... En prison, nous n’avions droit aux douches que trois fois par semaine.

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
Pour nous, les douches : c’était seulement deux fois par semaine ! Il ne faut surtout pas toucher les murs tellement ils sont sales... Il faut mettre des claquettes aux pieds, même pendant la douche, à cause des maladies bactériennes.

Témoignage de la Femme C : épouse d’un prisonnier politique basque. En liberté provisoire, auparavant détenue sur Paris, dans l’Etat français.
La garde à vue : l’absence totale de Droits.
Je crois que le pire moment, c’est celui de la garde-à-vue. Là, on a vraiment Droit à rien : ni de manger, de boire ou de se laver. Aucun contact n’est permis avec l’extérieur. Quand on est une femme et qu’on a ses règles, ce n’est pas évident ! Le choc de la garde à vue m’a fait venir mes menstrues immédiatement et je n’avais rien pour être propre...

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.

Moi, c'est le contraire. La garde à vue a provoqué l'arrêt de mon cycle menstruel. Il a fallu des mois avant qu'il fonctionne normalement...

Témoignage de la Femme E : membre d’Etxerat.
En garde-à-vue, on se sent sale. Cela enlève beaucoup d’assurance, on est encore plus vulnérable. On est vraiment entre les mains de la Police. Nous sommes volontairement diminuées et déstabilisées par les policiers.

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
Un système d’exclusions
A Fleury, tous les 15 jours, on avait le Droit d’acheter des serviettes mais pas de tampons hygiéniques. A l’époque, le paquet coûtait 28 francs : une fortune !
Grâce à la lutte menée par les prisonnier-e-s politiques basques, nous avons aussi gagné le Droit d’avoir une ‘cellule seule’. En prison, aucune information n’est donnée. Rien sur le fonctionnement interne. Rien sur la cantine, les soins, l’hygiène, les études, etc... Il faut constamment aller chercher soi-même l’information, en parlant avec les autres et en observant les choses. Il faut se renseigner et surtout, ensuite, il faut tout écrire, tout demander. Le système pénitentiaire nous fait payer très cher chaque ‘faveur’. En fait, il nous fait payer chaque Droit… Comme dans le cas de la bibliothèque dont j’ai parlé, les femmes ne sont pas au courant de leurs Droits d’accès au savoir, ni même de l’existence d’une bibliothèque !
Un changement profond. Un engagement politique renforcé
Avec et après la détention, les idées sont encore plus fortes. La répression nous donne encore plus de force : c’est une mauvaise stratégie de leur part que de nous incarcérer !
Par rapport à la société, avant, j’étais consciente des problèmes sociaux mais j’avais une analyse et une façon d’agir plus ‘pépère’. Dans la prison, j’ai vraiment touché de près la misère. On voit la vie autrement. On apprend un minimum de tolérance et on comprend pourquoi on peut chuter d’un seul coup dans la vie. Mais aussi, on comprend pourquoi une majorité de personne peut en arriver là après avoir vécu, souvent, une chute durant de longues années, petit à petit avec des conséquences toujours plus fortes...

Témoignage de la Femme B : ancienne prisonnière politique basque et mère d’un jeune prisonnier politique basque détenu à Puerto Santa Maria à Cadiz, dans l’État espagnol.
Les longues peines. Une détermination intacte et renforcée
J’ai connu des gens qui ont fait 18 à 22 ans de prison et qui en sont sortis. Une fois dehors, du point de vue politique, croyez-moi : leur conviction n’a pas changé ! Leur détermination est d’une force incroyable... Moi, j’avais un peu peur de cette situation des détenu-e-s qui ont passés 20 ans en prison. J’ai été très étonnée : ce sont des personnes vraiment solidaires des autres, d’une qualité humaine inimaginable !

Témoignage de la Femme C : épouse d’un prisonnier politique basque. En liberté provisoire, auparavant détenue sur Paris, dans l’Etat français.
Une survie permanente.
Le système carcéral français est différent de celui de Madrid. De même, il existe une grande différence entre les Centres de Détention et les Centrales. En France, il n’existe que très peu de centrales pour les femmes. Elles sont au nombre de quatre : Rennes, Loos et Joux-la-ville à côté de Lyon. Elles sont réservées aux lourdes condamnations : les visites sont plus longues et les cellules peuvent être ouvertes*.
* En 2003, de nouvelles mesures pénitentiaires ont permis de refermer les cellules des Maisons Centrales. Voir l’article N°11 « Qu’est-ce qu’une Maison Centrale ? » sur le site web de 'Prison.EU'

Témoignage de la Femme B : ancienne prisonnière politique basque et mère d’un jeune prisonnier politique basque détenu à Puerto Santa Maria à Cadiz, dans l’Etat espagnol.
Résister au système carcéral.
Comment tenir en prison, si tu n’as pas les idées claires ?

Témoignage de la Femme A : ancienne prisonnière politique basque et mère d’une prisonnière politique basque.
C’est impossible ! Dès que tu as un doute, cela te mine en profondeur et les dégâts peuvent être terribles... Par rapport aux autres femmes, on n’a pas le même vécu, ni la même lutte. Elles souffrent toutes socialement, mais elles ne se donnent pas les moyens d’organiser collectivement leurs luttes, donc de passer au niveau politique.
La drogue : une camisole chimique
La plupart ont d’importants problèmes de drogue. Une minorité seulement a la volonté de s’en sortir. Certaines personnes tentent de s’extraire de la dépendance aux substances chimiques mais l’administration les incite à en prendre en leur procurant gratuitement soit de la méthadone : un substitutif aux drogues dures (héroïne, cocaïne, amphétamines...) soit la fameuse ‘fiole’ dont la composition reste secrète et qui est composée d’un mélange d’antidépresseurs avec d’autres drogues. Je me souviens de certaines qui prenaient la fiole, du matin au soir. Pour ça, l’administration ne disait jamais non... Certaines filles arrivaient à ‘décrocher’ mais très difficilement. Une fois libérées, les femmes qui ont pris la fiole sont en manque de cette drogue qu’on leur donnait gratuitement, en permanence. C’est un cercle vicieux. Elles doivent alors trouver, chaque jour, de grande quantité d’argent pour acheter de la drogue... Évidemment, cela les conduit à la prostitution et à une marginalisation totale.

Témoignage de la Femme D : membre de Etxerat
Les prisonier-e-s politiques basques n’attendent rien ni de l’État français ni de l’État espagnol ! Ils contribuent à la lutte de libération politique et sociale et ils s’inscrivent dans le projet de statut politique et de construction nationale d’Euskal Herria qui touche l’ensemble des différents secteurs de la société.
Les principales revendications d’EPPK, le collectif des prisonnier-e-s politiques basques sont :
- Le statut d’Euskal Herria (à ce jour, ni reconnu par l’État français ni par l’État espagnol).
- Le statut des prisonnier-e-s basques incarcérés pour des raisons politiques.
- L’appartenance active au peuple d’Euskal Herria avec la volonté de participer à toutes les décisions politiques en cours. Des personnes ont été nommées et veulent prendre part à la construction nationale.
Une discussion interne est en cours, la décision n’est pas encore tranchée sur ce sujet.
- La volonté d’exercer le Droit de maintenir un lien familial et social, en tant que prisonnier politique.

Le collectif EPPK ne représente pas uniquement le secteur de la lutte armée (ETA). Il est composé des différentes tendances abertzale d’ezkera (nationaliste de gauche) de la société basque dont un nombre croissant de femmes. Tous ont en commun la lutte politique pour le Droit à l’Autodétermination d’Euskal Herria, tous reconnaissent qu’il existe un grave problème politique créé, maintenu et entretenu par les Etats français et espagnol.